Le SNALC souhaite ouvrir cette séance avec une pensée bouleversée pour notre collègue, assistante d’éducation, assassinée en Haute-Marne il y a quelques jours. Cet acte odieux ne peut rester un fait divers de plus, balayé dans un cycle d’indignation éphémère. C’est un drame humain, une alerte ultime : celle d’une École où la sécurité physique et psychologique des personnels n’est plus garantie. Nous pensons à sa famille, à ses collègues, à ses élèves. Mais surtout, nous refusons que son nom s’ajoute à la liste croissante de ceux et celles tombé(e)s dans l’exercice de missions éducatives qui devraient être protégées.

           Ce drame fait écho à ce que vivent de trop nombreux personnels dans nos établissements, dans l’indifférence générale : menaces, insultes, violences verbales ou physiques, peur croissante face à des élèves ou à des familles devenues intouchables. Peur aussi… de la hiérarchie, des procédures, de la mise en garde administrative qui peut donner lieu à une sanction ! Conseils de discipline qu’on attend mais qu’on ne déclenche pas, ou trop tard pour éviter les vagues.

           Et que dire de nos AED, souvent les premiers exposés, et pourtant les derniers protégés. Oubliés dans les discours, marginalisés dans les actes. Pourtant, eux aussi sont des agents publics, eux aussi méritent protection et respect. On voit bien ce qu’on fait de leur CDI dans certains EPLE !

          Nous dénonçons le renoncement qui fait des ravages par le refus d’appliquer les textes, de peur des parents ou des recours. Pourtant, les obligations sont claires :

  • Code du travail et code de l’Éducation : l’administration est tenue de protéger ses agents dans l’exercice de leurs fonctions.
  • BO du 5 décembre 2019 : il y est rappelé que « le respect dû aux personnels par les élèves et leur famille est un principe non négociable ».
  • La loi dite de l’École de la confiance impose explicitement le respect de la fonction enseignante.
  • La liberté pédagogique, pourtant affirmée dans l’article L.912-1-1 du Code de l’éducation, est aujourd’hui piétinée par des injonctions humiliantes de partenaires qui prétendent mieux connaître le métier que nous ! 
  • Plan de lutte contre les violences scolaires, circulaire n° 2019-122 du 3 septembre 2019, constitue un cadre officiel pour la prévention et la gestion des violences en milieu scolaire. Il peut être travaillé en Commission Permanente avec des élus et personnels impliqués.
  • L’entrave et l’entorse à l’enseignement par la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021, article 431-1 du code pénal.  

               La situation devient absurde : annulations d’heures de colle, refus d’exclusion temporaire au profit de l’inclusion, décisions pédagogiques contestées par des non-spécialistes, collègues experts écartés de conseils pédagogiques, atteinte à la liberté d’action syndicale… Où allons-nous ? Et pendant ce temps, le calendrier ministériel affelnet, lui, est maintenu sans scrupule, malgré nos cris d’alarme. Les conseils de classe de 3e ont eu lieu début juin, et pourtant, on nous demande de garder les élèves jusqu’au brevet, sans motivation ni cadre pédagogique réel, climat scolaire en tension, encadrement difficile, personnels en souffrance… mais toujours aucune remise en question du cadre. Là encore : du danger latent !    

           Le SNALC exige aujourd’hui des mesures immédiates, concrètes et durables. Nous ne sommes plus au stade du signalement. Nous sommes au point de rupture.

 Protection réelle des personnels, AED, AESH, CPE et enseignants. Application stricte des textes en vigueur.

 Recours systématique aux conseils de discipline en cas d’atteinte à la dignité ou à l’intégrité d’un personnel sans attendre la 3ème !

 Respect absolu de la liberté pédagogique, dans le cadre du Code de l’éducation.

 Révision urgente des calendriers administratifs, notamment pour Affelnet.

 Retour à un accompagnement individualisé, quand il est possible dans la structure scolaire, des élèves porteurs de handicap !

 Enfin nous demandons un délai supplémentaire pour le mouvement : le droit à la mobilité, garanti par l’article L.511-2 du Code général de la fonction publique, doit être respecté pleinement. Publier les résultats le 2 juin et imposer un travail à cette allure avec le même effectif à la DPES 3, ne pouvait permettre une optimisation de ces opérations !  Une semaine supplémentaire, c’est tout ce que nous demandons pour travailler efficacement avec les cellules du mouvement, la DSM, les GT renfort et les BMP. Du bon sens, tout simplement. Nous rappelons aussi que la mobilité est parfois la seule échappatoire pour des collègues écrasés par les contradictions, les injonctions, les peurs. Se taire, refuser un parcours linguistique, éviter un engagement professionnel, de peur des conséquences sur sa sérénité, tout cela devient une mesure RH.

            Nous espérons donc que ce nouvel assassinat ne sera pas un drame de plus qui  fera couler tant d’encre mais ne verra rein évoluer. Sécuriser, protéger, sanctionner les agressions, donner les moyens humains et juridiques aux établissements, solliciter les collectivités pour garantir la sécurité du climat scolaire : tout cela doit être notre priorité commune. Pas dans six mois. Pas à la prochaine réforme. Maintenant. Nous refusons d’être tués sur notre lieu de travail ! 

 Le SNALC continuera de porter, sans relâche, la voix de ceux qu’on n’entend plus. Parce qu’un établissement sans respect n’est plus un lieu d’apprentissage digne de ce nom.     

                                                                              Jérôme MOTET